Jour 6. Western Brook Pond

Le grand jour tant attendu est arrivée : la randonnée qui nous mènera jusqu’à la vue qui nous a tant fait rêver en photos : Western Brook Pond, avec vue sur le « faux fjord ».

Le départ avec notre guide est prévu à 8h30. Nous devons nous retrouver vers 8h15 sur le stationnement qui mène à la randonnée. Ben, le guide, arrive avec le reste du groupe à l’heure prévue. Nous sommes environ 8 personnes, qui ont l’air en bonne forme physique. Ouf ! Nous sommes rassurés, nous allons avancer vite et ne pas perdre de temps. Marcher à un rythme qui n’est pas le sien est souvent un calvaire. Avec Ben et les autres, nous prenons le chemin de 3km qui mène jusqu’à l’embarcadère pour prendre le bateau et se rendre au bout du lac pour commencer la randonnée. Bon rythme de départ, le groupe de marcheur est prometteur. Lorsque nous arrivons à l’embarcadère, fief de la compagnie bontours.ca, qui propose les excursions sur le lac, mauvaise surprise : on nous apprend que notre carte de crédit a été refusée.

Et la, je me souviens que le plafond de ma carte de crédit canadienne est à 600$… avec nos quelques achats fait auparavant, les 550$ prélevés par la compagnie ont donc été refusés ! Seule solution : payer sur place. Évidemment, lorsqu’on part pour une randonnée, on ne prend pas son portefeuille sur soi… tous nos papiers se trouvent dans la voiture, sur le parking à 3km de là ! Les employés sont embêtés, mais ils ne nous laisseront pas faire la randonnée sans avoir payé avant. Le guide me propose d’aller chercher de quoi payer, et de partir ensuite avec le prochain groupe, et donc avec un autre guide, environ 1h plus tard. Notre groupe initial, avec lui, ne peut pas nous attendre, le bateau qui les emmène au bout de l’étang est déjà là. Nous n’avons donc pas le choix. Fort heureusement le guide est très gentil et propose à Thibault de lui prêter son vélo, pour qu’il aille plus vite jusqu’au parking et se fatigue moins.

Une vingtaine de minutes plus tard, Thibault est de retour avec l’argent, en nage car il est allé très vite pour nous donner une chance de partir avec notre groupe initial. Malheureusement le groupe est déjà parti. Nous irons donc avec Brad, le deuxième guide, dans le groupe qui partira à 10h30. Nous sommes un peu déçus car notre premier groupe semblait d’un bon niveau, la marche allait être d’un bon rythme et surtout cela nous promettait de ne pas rentrer trop tard, mais aussi d’être les premiers de la journée en haut.

Notre nouveau groupe est essentiellement composé des femmes : elles sont 6 au total, avec deux hommes, Thibault et John, un américain qui accompagne sa copine. Nous embarquons tous dans le zodiac, que notre guide va conduire jusque de l’autre côté du lac, au départ de la randonnée. Avant de partir, il nous donne toutes les recommandations nécessaires. Petite précision, nous sommes les seuls français et personne ne parle français, j’essaye donc de tout comprendre afin de traduire à Thibault. Néanmoins l’accent à Terre-Neuve est assez difficile, ils parlent comme avec une patate chaude dans la bouche, il y a donc certains mots et certaines expressions que j’ai du mal à saisir mais, disons que je capte le plus important !

Le guide nous informe que la randonnée est difficile, que nous marcherons dans l’eau, dans la boue, et aurons à grimper des roches en utilisant nos mains. Pour lui le plus important est de garder une attitude positive et toujours le sourire. Ça promet… Thibault et moi ne sommes pas vraiment inquiets quant à la difficulté de la randonnée mais avons hâte de savoir ce qu’ils décrivent comme étant « très difficile ». Nous pensons qu’ils font surtout cela pour décourager les personnes peu sportives qui aimeraient monter là-haut et retarderaient donc tout le groupe. Le guide nous informe aussi que nous pouvons croiser un ours noir sur notre route, ainsi que des orignaux. Ils nous donnent les bons comportements à adopter, à savoir : ne pas les entourer, ne pas les coincer, ne pas courir, ne pas parler fort ou le regarder dans les yeux.

Ceci étant dit, le zodiac nous conduit ensuite au départ de la randonnée. La partie sur le bateau est déjà incroyablement belle puisque nous passons entre les falaises (par contre, il y a beaucoup de vent…).

Vers 11h, nous commençons enfin cette randonnée ! Les 4 premiers kilomètres se font dans de grandes herbes, avec un sol boueux. Rien de compliqué, la seule difficulté est de marcher avec les nuages de mouches noires qui nous attaquent de tous les côtés. Titi, qui y est pourtant réticent, sort même l’insecticide (c’est pour dire, y en vraiment beaucoup !).

Nous passons dans un endroit nommé « Moose middle », une espèce de cuve entourée de sapin, dans laquelle se trouve un petit étang. C’est l’endroit, comme son nom l’indique, où l’on est le plus enclin à voir des orignaux. Rien sur notre passage malheureusement. Le groupe, en même temps, est très bruyant. Cet endroit est tout de même assez impressionnant de par le caractère sauvage de la nature et le calme qui y règne. Il m’évoque le film Jurassic Park, je m’attends à tout moment à voir sortir des diplodocus de nulle part !

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Après avoir traversé les grandes herbes, la randonnée passe par des chemins très cahoteux, nous passons un bon moment à traverser de petites roches où les pieds ont tendance à glisser mais cela n’est pas très difficile. À 4km arrive enfin le moment tant attendu : la pente raide jusqu’au sommet. Les guides s’étaient fait un plaisir de nous décrire cela comme le moment le plus intense de la randonnée, celui qui allait nous demander le plus d’effort. En fait, c’est plutôt amusant : de grosses pierres nous aident à grimper, ce qui fait passer la pente de manière moins raide. Dans cette partie de la randonnée, l’activité ressemble plus à de l’escalade qu’à une marche ! Ce qui peut rendre l’ascension difficile est le chemin boueux, parfois glissant par endroit. Il faut donc bien s’assurer avant de grimper (même chose dans la redescente).

Après un peu plus de 3h de marche, nous arrivons à la vue tant attendue, à couper le souffle !

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Nous mangeons la haut et passons environ 1h30 à prendre des photos et nous baigner dans une petite vasque d’eau glacée qui se trouve juste derrière. Il fait très chaud, c’est vraiment agréable.

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À 15h30, nous prenons le chemin dans le sens inverse pour redescendre. Nous n’arriverons qu’à 18h30 au bateau, ralenti par les marcheurs inexpérimentés du groupe. Avec le groupe, cela nous a pris beaucoup plus de temps. Au final, l’expérience est magique car nous accédons à la plus belle vue, mais peut être pénible à supporter pour ceux qui ont l’habitude de marcher seuls et à leur rythme. Nous ne regrettons pas d’avoir dépensé autant d’argent car, le voyage à Terre-Neuve était aussi pour pouvoir accéder à ce panorama exceptionnel qui nous faisait rêver, et nous ne sommes pas déçus !Le petit plus : sur le retour, dans l’endroit appelé « Moose Middle » nous croisons un énorme orignal en train de manger… Je vous laisse admirer la bête :

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Après cette journée intense en rebondissement, nous retournons nous laver dans le ruisseau trouvé la veille, et manger sur les tables qui en sont proches. Une nouvelle fois, nous dormons à Sally’s Cove.

Jour 3. Direction Terre Neuve

C’est donc après avoir traversé 2 provinces, 3 fuseaux horaires et parcouru 2276 km en van que nous arrivons à Blanc Sablon pour prendre le ferry jusqu’à Terre Neuve et commencer ENFIN les vrais vacances (finis les lever à 5h du matin pour enquiller les kilomètres !).

Arrivés ici, nous ne trouvons personne à l’office des tickets pour le ferry, nous avions pourtant pensé prendre celui de 18h. Nous retournons sur nos pas pour aller à « l’office de tourisme » (qui est plutôt une mini bicoque située au milieu de nul part). Là encore… c’est fermé ! Pourtant, il est censé être seulement 16h ici… nous finissons par trouver un centre de service. Une femme qui parle français (Blanc Sablon a beau être au Québec, sa situation géographique éloignée de la province mais toute proche du Labrador fait que la plupart des habitant parlent seulement anglais) nous indique que le prochain ferry partira seulement à 6h le lendemain matin. Douche froide pour nous, qui pensions enfin arriver à Terre-Neuve le soir même. Nous nous résignons donc à passer la nuit ici dans notre van. On pourrait s’attendre à ce que Blanc Sablon soit une grosse ville, c’est la dernière du Québec à l’Est, et la seule à bénéficier d’un ferry pour Terre-Neuve… Détrompez-vous. La ville est très étendue mais finalement minuscule, une ville « du nord » comme nous en avons vu au Labrador, avec les poubelles maintenues dans des coffres en bois fermés par des cadenas pour éviter d’être éventrées par les ours…

Nous trouvons un endroit sympa pour manger (malgré un vent d’une puissance incroyable) et pour passer la nuit. Mais quelle nuit ! Comme nous n’avons pas de réservation pour le ferry et qu’il n’y a que 25% des places qui sont attribuées sans réservation, il faut y aller 2h30 avant le départ afin de se mettre sur liste d’attente et espérer qu’il reste une place pour nous. Ne reste plus qu’à prier. Comme le fonctionnent semble également très flou même pour les habitants et qu’aucune indication n’est claire, nous mettons un premier réveil à 1h du matin afin de nous rendre au bureau des tickets. Arrivés sur le parking, des voitures attendent déjà, les personnes dorment à l’intérieur. Le bureau est toujours fermé. Nous décidons de nous rendormir jusqu’à 2h30 du matin. À 2h30, rebelotte, le réveil sonne et nous vérifions si quelque chose à bouger. TOUJOURS RIEN, nous nous rendormons jusqu’à 3h. Finalement, à 3h20, nous sortons pour aller faire la queue devant l’office afin d’être sûrs d’être premier sur liste d’attente. Un monsieur attend déjà. À 4h, les bureaux ouvre et on nous donne un ticket. Nous sommes 7ieme. Après une demi heure d’attente à l’intérieur, nous passons enfin et pouvons réserver nos billets. Après cette épopée, nous allons nous installer sur la ligne afin d’embarquer dans le ferry. Victoire, Terre-Neuve nous voilà, et tu es bien méritée !!!!

Peu de temps après, à 7h30, le ferry arrive enfin à Ste Barbe, sur l’île de Terre-Neuve. Nous nous attendions à une ville assez conséquente (tout de même, c’est celle qui relie Terre Neuve au continent !) et bien non… Ste barbe est minuscule, quelques maisons, l’embarcadère du ferry et… c’est tout ! Nous retrouvons un peu les villages du Labrador, assez déserts. À la différence près que nous sommes ici au bord de la Mer. C’est magnifique !

Nous avons prévu de nous rendre directement à la pointe nord de l’île, en passant par Raleigh, Saint-Lunaire-Grécquot, L’Anse aux Meadows et Saint-Anthony. Raleigh se trouve à une heure et demi de Ste Barbe. Nous sommes fatigués par la route des deux précédentes journées mais savons que cela vaut la peine. Nous arrivons à Raleigh vers 9h30. Le village de pêcheur semble désert, mais la vue est incroyable. Nous profitons de ce calme pour prendre un petit déjeuner et nous accorder une sieste bien méritée dans le van. À 11h, le réveil sonne ! Nous partons prendre l’air pour nous réveiller sur une petite colline qui surplombe le village.

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Par la suite, nous prenons la route pour l’Anse aux Meadows.  Ici, site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, nous visitons l’endroit où les vikings auraient vécu en débarquant du Groenland, il a environ mille ans. Les habitations de l’époque ont été reconstruites, on s’y croirait presque…

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Chanceux, aussitôt que nous mettons les pieds sur le site, nous apercevons deux orignaux en train de manger un peu plus loin.

Majestueux une fois de plus ! Après cette courte visite, intéressante mais tout de même très rapide, nous reprenons la route pour Saint Anthony. La ville est un peu plus grosse, il y a un Tim Hortons ainsi qu’une assez grande épicerie où nous en profitons pour refaire le plein de victuailles. Ici, les prix sont légèrement plus élevés qu’au Québec mais les habitants (et les touristes !) sont exemptés des taxes. La note n’est donc pas si élevée. Pas d’autres interêt notable car aucun iceberg à l’horizon…

Nous décidons de reprendre la route, une fois de plus afin d’être débarrassés et de nous réserver les jours suivants uniquement à de la marche. Fini les grosses distances, ça sera la dernière fois avant plusieurs jours. Nous partons, vers 15h, au sud ouest de l’île, rejoindre le parc national du Gros Morne. Nous arrivons à 19h au centre d’accueil de Rocky Harbour.Ici, nous nous renseignons sur les meilleures randonnées à faire dans le parc. Il y a peu de « grandes » randonnées, la plupart sont d’une durée moyenne, mais toutes sont magnifiques. Le parc se partage en trois parties, séparées les unes des autres par 30min à 1h30 de route en voiture. Il est immense ! Au sein du parc, plusieurs petits villages longent la côte, ils sont, sur les cartes, en dehors du parc. En van, nous n’avons pas le droit de dormir dans le parc, à moins d’avoir payé un camping. La seule option est donc de dormir dans les petits villages au sein du parc, qui ne sont pas comptés comme étant dans le parc. Nous trouverons très facilement ici des endroits où dormir tout au long de notre séjour, et même de très beaux endroits.

À l’accueil, nous en profitons pour nous renseigner sur LA randonnée incontournable du parc du gros Morne : le Western Brook Pond. Mais si ! Regardez sur internet ! Tout aventurier qui se respecte a déjà vu cette photo avec cette vue incroyable quelque part :

Et bien c’est au Gros Morne, et nous sommes fermement décidés à y aller. Avant de partir, j’avais appris dans mes petites recherches sur internet que le seul moyen d’accéder à cette vue était de traverser le lac (Western Brook) avec une compagnie (bontours.ca, la seule à proposer cette traversée) pour un tour de deux heures et une modique somme de 65$. Néanmoins, je n’avais trouvé aucune indication sur la randonné qui menait à cette fameuse vue. Je savais seulement qu’il fallait être accompagné d’un guide, et que le bateau nous déposait au départ de cette randonnée. C’est avec stupeur que, au centre d’accueil, nous en avons appris plus… Effectivement, le tour en bateau est bien obligatoire pour déposer au départ de la randonnée.

Le guide prend le bateau avec nous, et la randonnée dure ensuite sur toute la journée, avant de rentrer en bateau de nouveau. Nous qui ne sommes pas fervents de visites avec guide, nous avions décidé de prendre sur nous, trop heureux que nous étions à enfin pouvoir jouir de cette vue ! La surprise vint après, à l’annonce du prix… 275$ par personne pour grimper cette montagne !!! Raison officielle : il n’y a pas de chemin tracé par Parc Canada, on ne peut pas y aller seul, c’est une randonné très difficile… encore à vérifier. Après avoir pris les renseignements sur les autres rando incontournables du parc (dont l’ascension du Mont Gros Morne) je demande à la jeune fille de l’accueil où nous pourrions nous doucher dans la ville (nous avons bien la douche portable dans la voiture, mais une vraie douche est toujours plus appréciable n’est-ce pas !) elle nous informe que la piscine de Rocky Harbour laisse les personnes comme nous (les vagabonds ?!) se doucher gratuitement. Après une bonne douche là-bas, nous filons à l’office de « Out Adventures », l’entreprise qui propose la montée du fjord Western Brook Pond avec les guides. Il est 20h déjà, mais ça tombe bien, les guides sont dehors en train de discuter. Je leur demande s’il leur reste de la place pour le lendemain, car j’ai vu qu’il ferait très beau. Hélas non, tout est complet jusqu’au lundi, soit deux jours plus tard. Tant pis, nous irons donc lundi ! Le guide m’informe que je dois passer le lendemain matin à l’office de BonTours, la compagnie qui s’occupe des bateaux (ceux qui nous emmène au départ de la randonnée) pour faire ma réservation. En fait, l’entreprise qui propose la randonné et la compagnie de bateau qui propose des traversées du lac semblent avoir un accord ensemble. Si vous n’avez pas de guide, ils ne vous débarqueront pas pour que vous puissiez faire la randonnée seule ! Business is business…Après cette journée bien chargée, nous cherchons un endroit pour manger puis passer la nuit.En allant sur la partie sud du parc, à la sortie de Rocky Harbour, nous trouvons un superbe point de vue sur la baie, vers Jenniex House (Norris Point). Malheureusement, il est interdit de camper ou de passer la nuit sur ce stationnement. Après manger, nous retournons donc en ville pour trouver un endroit où poser le van pour la nuit. Cela se trouve très facilement.

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